Avez-vous déjà répété le même mot tellement souvent qu’il ne veut plus rien dire? Il s’agit en fait d’un phénomène fascinant appelé saturation sémantique. Ce phénomène a même été utilisé auprès de bègues pour diminuer l’intensité des émotions négatives déclenchées lorsqu’ils doivent parler1. Toutefois, dans le monde des placements, nous avons un exemple plus banal de mot qui a perdu tout son sens : risque.

À force d’en avoir tant parlé, notre compréhension du « risque » est-elle déphasée? Après la chute marquée et la remontée inattendue des marchés boursiers en mars 2020, comment définir le risque aujourd’hui?

En finance, la définition générale du risque correspond à la possibilité que le rendement réel d’un placement diffère de son rendement attendu2. Habituellement, le terme volatilité sert à décrire cet écart et nous constituons des portefeuilles de clients en fonction du degré de volatilité que les clients sont prêts à accepter.

Par contre, la volatilité nous en dit-elle suffisamment sur le niveau de risque que nous devrions tolérer pour l’avenir? Par exemple, la volatilité aborde-t-elle la possibilité de la perte permanente d’une épargne durement gagnée? Aborde‑t‑elle la charge émotionnelle et les nuits blanches auxquelles les investisseurs ont dû faire face lors de la crise financière mondiale de 2008?

Nous pensons toujours au fait qu’il incombe aux investisseurs justement de tolérer l’incertitude qui nous donne l’occasion d’acquérir un rendement futur. Mais comment mieux quantifier le risque dans le cadre de la gestion de notre épargne?

Sur une base historique, le profil de risque d’un investisseur sur le plan qualitatif et quantitatif est établi selon le concept de tolérance au risque et évalué au moyen d’un questionnaire de tolérance au risque générique. Cependant, la tolérance au risque d’un investisseur peut fluctuer.

À partir de 2022, nous vous informerons davantage sur les changements apportés à la définition de risque, ainsi que sur les variantes de cette définition. En plus du sujet habituel de la tolérance au risque que tous nos clients connaissent bien, nous allons aborder la « capacité à prendre des risques » et la quantification de cette capacité.



Tolérance par rapport à capacité

Voyons la tolérance au risque et la capacité à prendre des risques comme deux piliers sur lesquels reposent une plateforme, représentée ici par le profil de risque de l’investisseur.

Le premier pilier, la tolérance au risque, correspond à notre volonté d’accepter le risque3. Il s’agit d’une donnée psychologique, influencée par nos croyances, nos expériences et même des facteurs biologiques4. Elle est de nature instinctive et répond à nos émotions, et ce, à chaque soubresaut du marché. Nous tentons d’évaluer la tolérance au risque lorsque nous posons des questions comme « Quelle perte de valeur de votre portefeuille pouvez-vous tolérer sans broncher? »

Même si les connaissances et la prise en compte de l’horizon de placement d’un investisseur peuvent préciser notre évaluation de la tolérance au risque, d’un point de vue pratique, ces données peuvent ne pas être fiables. Les attitudes par rapport au risque changent en fonction de l’âge, des événements récents survenus sur les marchés, de l’expérience de vie et même de notre environnement immédiat5. Par exemple, il a été observé que la prise de risque est accentuée chez les automobilistes en colère qui sont pris dans la circulation6.

 

Compte tenu de la nature cyclique des marchés financiers, où nous situons-nous? Si la tolérance au risque peut fluctuer selon différents facteurs impondérables, quels sont les autres outils à notre disposition pour compiler le niveau de risque lié aux placements que nous devrions prendre?

Et maintenant le deuxième pilier du profil de risque : la capacité à prendre des risques.

Il s’agit du niveau de perte que les investisseurs sont prêts à accepter au titre de leur portefeuille, sans que cela affecte leur capacité à s’acquitter de leurs obligations financières. Alors que la tolérance au risque est une question de volonté face à un risque financier potentiel, la capacité à prendre des risques est, comme son nom l’indique, une question de capacité7.

La capacité à prendre des risques dépend du bilan de l’investisseur. Si ce bilan est associé à un plan financier significatif pour le client, les évaluations de la capacité à prendre des risques peuvent contribuer à préciser le profil de risque. Au lieu de demander à un investisseur la perte qu’il est prêt à accepter avant de céder à la panique, nous pouvons orienter l’évaluation en fonction d’objectifs personnels concrets.

Donc, pour déterminer la capacité à prendre des risques, nous pourrions poser la question suivante : compte tenu de votre situation financière actuelle, quelle perte pouvez-vous subir avant de ne plus être en mesure de financer les études de vos enfants? Avant de devoir repousser votre date de départ à la retraite? Avant de devoir revoir à la baisse votre mode de vie? De telles questions ancrent le profil de risque dans des facteurs beaucoup plus concrets qu’une simple réaction émotive à la volatilité. 

1   Semantic Satiation  . Wikipedia, Wikimedia Foundation, 29 avril 2021, disponible sur le site Semantic satiation — Wikipedia.
2   Risque  . Investopedia, disponible sur le site Risk Definition (investopedia.com).
3 Commission des valeurs mobili res de l’Ontario.   Reforms to Enhance the Client-Registrant Relationship (Client Focused Reforms)  . Supplement to the OSC Bulletin, Volume 42, Issue 40 (Supp-1), 3 octobre 2019, disponible sur le site ni_20191003_31-103_reforms-enhance-client-registrant-relationship.pdf (osc.ca).
4 CFA Institute.   Risk Tolerance and Circumstances  , mars 2018, disponible sur le site Risk Tolerance and Circumstances (cfainstitute.org).
5 Ibid.
6 MCDONALD, S.   Risk & Road Rage: Why Driver Safety is More Than Just Skill  , Thinking Driver, 25 f vrier 2013, disponible sur le site https://www.thinkingdriver.com/blog/news/risk-road-rage-why-driver-safety-is-more-than-just-skill.
7 FinaMetrica.   What Is Risk Tolerance and Why Do We Measure It?  , disponible sur le site Risk Profiling — FinaMetrica: Home of Risk Tolerance Testing, consult  le 9 d cembre 2021.

Conclusion

Le mot risque revient 40 fois dans cet article. Si le fait de le répéter trop souvent vient nous induire en erreur quant à sa signification, il n’est pas étonnant qu’il soit difficile à définir et à mesurer.

Heureusement, en quantifiant le risque – et les termes qui y sont associés – selon une perspective plus large, nous pouvons mieux comprendre les risques que prennent les investisseurs en vue d’offrir des rendements suffisants pour concrétiser nos objectifs financiers.



Auteurs

Bureau d’Edmonton



Marshall McAlister, CFA
Marshall McAlister, CFA
Conseiller, Gestion de fortune
Cary Williams, CFP, CIM
Cary Williams, CFP, CIM
Conseiller, Gestion de fortune
Kayla Poohachoff, CFP, CIM
Kayla Poohachoff, CFP, CIM
Conseill re adjointe, Gestion de fortune

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